Samantha Bailly

Bilan 2018 et projets 2019

Publié le : 12 janvier 2019

Et voilà venue l’heure du traditionnel bilan de l’année écoulée, ainsi que la prospective de l’année à venir ! 2018 se referme, 2019 démarre. Revenons un peu en arrière, pour se projeter dans l’avenir. 2019 sera une année particulière, puisque l’année d’un anniversaire : cela fera, en avril, 10 ans que j’aurais publié mon premier ouvrage. 10 ans, donc, que je navigue dans l’univers de l’édition. Vous êtes très nombreux à me suivre depuis mon premier roman, La Langue du silence, mais surtout depuis bien plus longtemps, sur le web. Je tenais, en guise d’ouverture de ce bilan, à vous remercier, encore et encore, pour vos mots, nos échanges, nos discussions, et ce fil continu qui se tisse au fil des années. C’est une source infinie de réflexion et d’encouragement.

Écriture

En 2019, pour la première fois depuis très longtemps, j’ai finalement assez peu écrit, en comparaison des quinze dernières années. J’ai corrigé, ça oui. Reprendre La Marelle m’a demandé beaucoup de temps, de réflexion, d’allers retours entre une dizaine de versions différentes. J’ai terminé le scénario du manga Alchimia, le manga avec Miya, et là encore, ce fut un long travail d’ajustements, de coupes, d’ajouts. Et puis il y a ce roman, ce roman qui est arrivé de façon complètement imprévue, une fulgurance, le fruit de ma rencontre avec l’autrice Anne-Fleur Multon, j’ai nommé… C’est pas ma faute. C’est pas ma faute est un thriller adolescent, un drame social et une histoire d’amitié et de solidarité à l’aune des réseaux sociaux. Nous écrivons ce roman à quatre mains, ce qui est une expérience absolument inédite pour moi, ayant davantage l’habitude de collaborations auteur / dessinateur. Cette fois-ci, c’est une collaboration au cœur même de l’écriture. Nous prenons le temps, nous ciselons, discutons, lisons à voix haute chaque paragraphe… et avons la grande joie d’avoir trouvé pour ce roman un formidable éditeur, dont l’identité sera bientôt dévoilée.

 

En dehors des livres, j’ai surtout écrit des scénarios dans le domaine du jeu vidéo. Ces collaborations sont souvent placées sous le sceau de la confidentialité, les développements sont longs, mais j’ai pu vous parler d’un projet : le jeu J’accepte, produit par UFC-Que choisir, dont j’ai signé l’histoire. En résumé, 2018 a été une année de prise de recul, de prise de temps.

Avant donc que d’écrire, apprenez à penser. Ce que l’on conçoit bien s’énonce clairement, Et les mots pour le dire arrivent aisément. Hâtez-vous lentement, et sans perdre courage, Vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage, Polissez-le sans cesse, et le repolissez, Ajoutez quelquefois, et souvent effacez.
Boileau
L’Art poétique

Parutions

Quatre de mes ouvrages sont sortis en 2017 :

MERCI à vous pour l’accueil que vous leur avez réservé. Vous avez été très nombreux à venir au moment des différentes sorties. Je me régale de vos chroniques, avis, réactions, sur les réseaux. Et c’est toujours un bonheur de pouvoir échanger avec vous de vive voix sur vos impressions de lecture.

Déplacements et événements

Cette année, j’ai clairement commencé à lever le pied sur les déplacements et salons, et je vais continuer à suivre ce ralentissement en 2019. Le mouvement #Payetonauteur, au mois de mars, n’a fait que participer à ma prise conscience plus générale du temps si important, sur mon temps personnel, que je passais bénévolement à sillonner la France depuis maintenant… 10 ans ! Aussi, le fait d’avoir découvert de façon encore plus approfondie la façon dont sont considérés les auteurs jeunesse, grâce au travail de la Charte des auteurs et illustrateurs jeunesse, et leur rémunération systématique, m’a donné envie, aujourd’hui, d’accepter uniquement les événements rémunérés. C’est une question d’estime de mon temps, de mon travail, et aussi un véritable parti pris par rapport à mon métier.

Vidéos

Lancée en mars 2016, ma chaîne Youtube poursuit son chemin, même si le rythme de l’année 2018 aura été bien plus calme. D’ailleurs, quand on voit les vidéos que j’ai posté durant l’année, on comprend que c’est l’urgence sociale vécue par les auteurs qui a pris le dessus, puisque c’est ce thème que j’ai traité. J’ai privilégié le format du strip BD, notamment avec Miya, où nous avons expliqué de façon très simple et pédagogique les problématiques des auteurs et autrices du livre dans une série de strips Auteurs, un métier ? Episode 1 : qu’est-ce qu’un auteur ? et Episode 2 : quel régime social pour l’auteur ?

La chaîne est passée de de 12500 à 18000 abonnés, et totalise désormais près de 800 000 vues.

Engagement

C’est la partie la plus développée de ce bilan 2018, parce que celle qui a occupé le plus de mon temps. Les engagements sociaux. D’abord, à travers la présidence de la Charte des auteurs et illustrateurs jeunesse et la gestion de l’association au quotidien, grâce à des auteurs bénévoles très investis et solidaires (big up le conseil d’administration !). Mais aussi tous les projets qui y sont liés, comme les Etats Généraux du livre, les Masterclass juridiques de la Charte, les pastilles vidéos, et bien d’autres projets.

Dès mars, à travers #Payetonauteur, le mouvement est monté en puissance. Il y a clairement un avant et un après, que ce soit dans les institutions, les partenaires sociaux, les festivals… ce mouvement aura joué un rôle majeur dans la prise de conscience collective de la condition de l’auteur aujourd’hui.

J’ai passé un temps fou dans des réunions de concertations, à rencontrer des interlocuteurs de tous les horizons, pour alerter sur les problèmes sociaux. Ce qui m’a le plus choquée, c’est que dans les yeux de nombres d’entre eux, de ceux et celles qui façonnent les textes et les lois pour nous, nous ne sommes pas considérés, les auteurs, comme exerçant un métier. Ce constat est finalement l’acmé d’un long processus mental. Comprendre que nous sommes, en réalité, si peu et si mal défendus. Que les auteurs sont prisonniers d’injonctions paradoxales incroyables, quasi impossibles à surmonter : être considérés parfois comme des actifs, parfois comme rien du tout, à l’image de la façon dont nous sommes traités par les administrations et les pouvoirs publics.

 

Alors l’année 2018, je l’ai passée à ça, à dire, argumenter, expliquer, que la notion de création n’exclut pas celle de travail, qu’il fallait changer de paradigme mental, sortir des histoires que l’on se raconte depuis des décennies si ce n’est des siècles, déconstruire cette mythologie toxique de l’auteur comme être désincarné, de la création comme excluant toute notion de temps, d’énergie, d’argent. Quelque part, tout était déjà en germe par l’existence même de ma chaîne Youtube, dont la démarche initiale est la suivante : montrer l’envers du décor, informer en partant du constat que j’avais eu énormément de mal, pour ma part, à trouver des informations, et se filmer pour montrer qu’un auteur est un être humain, bien vivant, de chair et d’os, qui créé mais qui participe, qu’il le veuille ou non à partir du moment où son livre est commercialisé, à une industrie.

Partant de ce constat, après bien des discussions avec d’autres auteurs, après bien des discussions avec d’autres organisations, nous avons décidé d’agir. Jeudi 6 septembre 2018 se sont réunis, dans la maison où vécut Balzac, des auteurs de tous les horizons : littérature générale, littérature jeunesse, bande dessinée, polar, romance, auto-édition… Des jeunes auteurs faisant leurs premiers pas dans le monde de l’édition aux auteurs de best-sellers ayant marqué ces dernières décennies, nous avons décidés de nous unir pour prendre notre destin collectif en main.

La Ligue des Auteurs Professionnels est née sous l’impulsion de la Charte des auteurs et illustrateurs jeunesse, des États Généraux de la Bande Dessinée, du SNAC BD, mais aussi de Joann Sfar, Tatiana de Rosnay, Marie-Aude Murail, Agnès Ledig, Virginie Grimaldi, Erik L’homme, Denis Bajram, Benoit Peeters, Gaëlle Nohant, Maliki, Delphine Bertholon, Cy, Valérie Mangin, Christophe Arleston, Xavier Dorison, Sophie Adriansen, Aurélie Neyret, Mathou, Nicolas Digard, Audrey Alwett, Michel Robert, Léa Frédeval, Marie Spénale, Joris Chamblain, Sophie Dieuaide, Guillaume Nail, Alexis Sentenac, Adrien Thomas, Baptiste Beaulieu et bien d’autres auteurs.

 

C’est le rassemblement inédit d’un collectif d’auteurs et d’une fédération d’organisations. Tous, nous nous liguons pour sauvegarder le métier et améliorer les conditions de création de tous les auteurs : protection sociale, rémunération, renforcement du droit d’auteur, question de la notion de travail, rééquilibrage du rapport auteur/éditeur…

 

Pour la Ligue des Auteurs Professionnels, il est urgent de construire les changements qui permettront de sauver un métier en grand danger.

 

La création de cette association est la concrétisation logique et audacieuse du mouvement #Payetonauteur, et nous avons été reçus rapidement par le Ministre de la culture, à qui nous avons pu exprimer notre vision. Nous avons eu le sentiment d’être entendus. Espérons que ce ne soit pas qu’un sentiment.

Et 2019 ?

Écriture

2019 ne sera pas une année comme les autres. C’est une année où il n’y a pas de plan. Pas de contrainte. Pas d’engagement vis-à-vis de l’écriture. Nous allons tranquillement terminer notre roman à quatre mains, C’est pas ma faute, avec Anne-Fleur Multon, qui est déjà très avancé, autant sur l’architecture complète du scénario, fouillée et détaillée, que sur l’écriture elle-même. Nous avons le temps, un temps qui s’étire, puisque la parution sera pour début 2020. Je tiens ici à remercier du fond du cœur l’éditeur qui nous accompagne sur ce projet. Ce genre d’éditeur, peu importe son parcours, répond tout à fait à mes yeux la figure de l’éditeur comme partenaire tel qu’on le décrit ou l’espère. Un éditeur pointu, qui laisse du temps au livre de naître, de mûrir, d’aboutir, qui comprend que l’écriture est pour Anne-Fleur et moi, non seulement notre passion, mais aussi un métier, avec les conditions allant avec. L’écriture de C’est pas ma faute va donc poursuivre son chemin, dans cette temporalité plus lente qui m’est si nécessaire.

 

Je vais aussi écrire des textes pour une start-up, mais là, je ne peux absolument pas en dire plus, et poursuivre des collaborations dans l’univers du jeu vidéo.

Samantha Bailly et Anne-Fleur Multon

Parutions

Cinq de mes ouvrages sortiront en 2019, la plupart de ces parutions étant des reprises en format poche :

  • Indéterminés, chez Le livre de poche, en mars
  • Nos âmes jumelles, chez Le livre de poche jeunesse, en mai
  • Nos âmes rebelles, chez Le livre de poche jeunesse, en juillet
  • Alchimia, tome 3, chez Pika, en juillet
  • Nos âmes plurielles, chez Le livre de poche jeunesse, en septembre

Le grand voyage

Seconde moitié 2019, je quitterai la France pendant un certain temps. Je ne peux pas encore vous en dire plus sur pourquoi, comment, cela viendra au fur et à mesure. Vous qui me suivez depuis longtemps ici, vous avez sans doute lu beaucoup de mes articles. Souvent, je parlais du paradoxe que je vivais, d’être en principe libre de ses déplacements, mais que très rapidement, je me retrouvais dans des contraintes où il était très difficile de voyager vraiment et longtemps. La liberté totale du métier d’auteur est un autre mythe, y compris la liberté géographique. Ce voyage, je souhaite le faire depuis 2 ans. Entre temps, il se trouve que ma mère est tombée gravement malade, j’ai donc suspendu ce grand projet de vie pour tâcher de passer du temps avec elle, tant que cela était encore possible. Après son départ il y a quelques mois, j’avais beaucoup de mal à me projeter. Mais je sens aujourd’hui, au plus profond de moi, qu’il est temps de plier bagages, et de faire ce à quoi j’aspire depuis longtemps.

Engagements

Ils se poursuivront, bien sûr, à travers la Charte des auteurs et illustrateurs jeunesse et la Ligue des auteurs professionnels ! Mais aussi, je le souhaite, à travers de nouveau ma chaîne Youtube, des articles, et pourquoi pas d’autres formats. Si le travail auprès des institutions, si les campagnes de revendications, sont très importantes, je veux toujours continuer de faire à ma façon : c’est-à-dire proposer des contenus travaillés, en exerçant un esprit critique, et de façon tournée vers l’extérieur. Il me semble que l’information est la clef pour que se poursuive la prise de conscience qui a éclos en mars dernier. Mon engagement vient d’une conviction très intime, de mon parcours aussi, et les codes actuels de la « politique », disons, ne sont ni dans mon registre, ni dans ma façon de penser. Je vais donc continuer à m’engager… comme une autrice 😉

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